26/11/2015
*Se réfugier*
Mon café est de moins en moins fort et de plus en plus sucré. J'ai choisi une jupe au tissu si fluide qu'elle danse sur mes jambes et vous savez comme j'aime. La soie se cache sous la laine douce. Je m'emmitoufle. Je m'arrête dans le rayon du soleil et me laisse pleurer sous la pluie. Je glisse mes mains dans les boucles sous les chemises et dans les pages. Je suis en quête de voix graves aux mots tendres de voix gaies aux mots chantants, je n'entends plus ceux qui piquent ceux qui crient ceux qui savent mieux que personne. J'offre à la lune son dernier quartier et je me rêve nue sous elle. Je me rêve dans un refuge abandonné. Je me rêve dans une chambre anonyme. Je me rêve sous la plume de cent édredons. Je me rêve dans le vent glacé de Venise. Je me rêve avec mes joyeux à me rouler dans la neige. Je me rêve patiente. Je me rêve muette à écrire tout enfin. Ou, au contraire, plus rien. Je me rêve une maison. Je n'ai plus envie de donner d'explications.
Et puis, merci beaucoup pour vos mots et vos commandes.
Et pour toutes celles qui s'inquiètent, le tampon "Boîte aux lettres" sera de nouveau disponible dans le courant du mois de décembre.
14/11/2015
*Sinistrer*
Avant, quand je passais devant le Bataclan, je pensais toujours à Jane. Jane B. C'est là que je l'ai vue la première fois en vrai. Dans le hall d'abord, on s'est croisées, puis en concert le même jour.
Maintenant, quand je passerai devant le Bataclan, je penserai encore à Jane, inévitablement, mais pas seulement. Je penserai à Jane, et au désastre.
Et puis, quand je tournerai à angle droit au bout de la rue Faidherbe avec mon vélo, parce que je tourne souvent à angle droit au bout de la rue Faidherbe avec mon vélo pour prendre la rue de Charonne, eh bien, oui, eh bien, non, enfin, si, l'angle sera toujours là, mais il ne sera plus droit, il sera obtus il sera mort. Et je ne pourrai pas m'empêcher d'imaginer les corps.
Et le vendredi, quand le bourdon me prendra et que je dirai, viens, on va boire au Comptoir, viens, on va danser au Point éphémère, viens, on va longer le canal, comme je l'ai fait tant de vendredis soir, eh bien, je saurai qu'il est désormais possible de ne jamais se relever de cette envie-là.
13/11/2015
*Informer*
Passer par ici vous dire que nous allons avoir trois raisons de se rencontrer prochainement :
Je serai chez Miss Dejolilou à Bourges les samedi 21 et dimanche 22 novembre.
Je serai au Little Klin d'oeil, à Paris, les samedi 5 et dimanche 6 décembre, avec 20 autres créateurs.
Je serai chez Maison Bastille, le dimanche 13 décembre, avec Mister Wood et Bla, bla etc !
Vous notez ?
Hier, moi, j'ai noté dans mon carnet : "Parfois, je ne sais pas pourquoi on me sourit."
Si vous venez me voir, je vous promets de ne pas chercher à savoir...
06/11/2015
*Vendrediser*
Allez savoir pourquoi le vendredi soir plus que les autres soirs m'entraine vers le déclin. Allez savoir pourquoi le vendredi soir plus que les autres soirs je cherche la fuite. Allez savoir pourquoi la douceur de cette pluie de novembre m'attire. Allez savoir pourquoi je vais aimer entendre le claquement des talons sur l'asphalte. Allez savoir pourquoi l'odeur de terre mouillée le long du jardin des plantes va m'alléger. Allez savoir pourquoi imaginer mes doigts sur le verre de vin déjà me grise. Allez savoir pourquoi danser rend heureux je les ai vus dimanche sur les quais ce n'était que sourire. Allez savoir pourquoi la nuit est tombée à seize heures en même temps que les premières gouttes. Allez savoir pourquoi j'ai trouvé ça très doux. Allez savoir pourquoi j'ai contemplé longtemps les chemins sur la vitre mouillée et le mouvement des feuilles malmenées par le vent. Allez savoir pourquoi j'en ai profité pour commander des plumetis. Allez savoir pourquoi j'ai augmenté le son au moment de la chanson. Allez savoir pourquoi etc.
Allez savoir pourquoi surtout je ne veux pas le savoir.
03/11/2015
*Déséquilibrer*
J'aime bien revenir.
J'aime bien écrire presque rien.
J'aime bien recevoir "Salut Papillon de nuit", la nuit.
J'aime bien quand vous me faites croire que je suis votre
J'aime bien quand tu aimes que j'ose te parler ainsi.
Je sens bien que je me tiens en équilibre sur rien.
Mais parfois. J'aime bien.
Cette petite phrase se retrouve sur une des cartes du calendrier Duo qui semble vous plaire beaucoup.
23/10/2015
*Pluvioter*
En regardant par la fenêtre je me suis laissée aspirer par la douce désolation de l'automne et par l'appel silencieux du crachin. Il pluviotait sur les quais dorés d'octobre et je suis arrivée jusqu'à cet endroit où les chiens furètent gaiement et les amoureux s'enlacent sur les bancs de pierre.
C'était si gai de sentir dans mon dos la lumière décliner. Les mouettes m'accompagnaient.
A la fin de ma promenade la nuit était tombée et les trottoirs luisaient comme j'aime qu'ils luisent et il bruinait encore comme j'aime qu'il bruine et les verrières d'Austerlitz reflétaient mon désir dans le ciel.
Après j'ai parlé de dérive, d'écho et de petits bas de laine.
1 - Je dédie ce papillonnage à l'Arrosoir.
2 - Ce dessin est un très vieux dessin repêché. Pardon.
3 - Merci beaucoup pour toutes vos commandes !
15/10/2015
*Détailler*
Alors l'envie me prend de m'enfuir en forêt pour entendre dans le silence les feuilles croustiller sous mes pieds.
Alors l'envie me prend de m'enfuir à la mer pour sentir l'air glacé et les embruns m'ébouriffer.
Alors l'envie me prend de longer la Seine pour parler à personne et laisser le vent m'enlacer.
Alors l'envie me prend de traverser le pont parce que de l'autre côté parfois le détail est un autre.
Alors l'envie me prend d'un café sous le miroir dans le bel endroit.
Et d'une main qui effleurerait mon genou sous la table.
08/10/2015
*Tomber*
C'est sur le pont Marie il a le journal à la main et sur la première page mes yeux lisent ça :
"Etre un homme, c'est pouvoir infiniment tomber." (Aragon)
Je trouve cette petite phrase immédiatement infiniment belle et la Seine sous mes yeux infiniment belle aussi et la lumière de ce jour d'automne aussi douce que le vent qui s'engouffre dans ma veste et que.
Je me souviens aussitôt d'un de mes premiers papillonnage.
Il disait ça :
Tomber
Par hasard
Sur quelqu'un
Se heurter
Se blesser
Se traîner
Tomber
Tomber
Tomber encore
Tiens
Oui
C'est l'automne
Je n'écris plus comme ça aujourd'hui.
Mais je tombe encore. Parfois. Infiniment.
07/10/2015
*S'emparfumer*
La pluie avait réveillé le parfum de la lavande
L'effluve m'a caressé les joues
C'était délicieux. Cela aurait dû être suffisant.
*
Les calendriers 2016 sont prêts.
Quelques nouvelles cartes, aussi.
Et un accordéon amoureux.
Là.
Vous me direz ?
29/09/2015
*S'inventer*
A les regarder sous la bruine, dans la nuit, les cheveux fous sous les feuilles endormies
A les regarder sur le pont, dans l'après-midi, les yeux étirés par le contre-jour, la bouche ourlée par la douceur des joues
A les regarder devant les entrelacs du mur gris, dans la lumière bleue, les mains mêlées au lierre désormais disparu
A les regarder les épaules liées les secrets déliés les pieds échangés et le même refrain
C'est moi que j'ai vue
C'est décidé
Je continue
De m'inventer
16/09/2015
*S'ajournaliser*
Si je tenais un journal, j'aurais écrit qu'il avait cessé de pleuvoir et que j'aime pédaler quand l'asphalte luit dans le soir, quand le caoutchouc des pneus s'imprime sur le gris avec une petite musique presque poétique et quand s'élèvent au-dessus du jardin sombre des parfums de feuilles mouillées.
Si je tenais un journal, j'aurais écrit que j'ai aimé attendre dans la rue derrière la porte vitrée et que je sentais se former très profondément en moi le sourire à venir.
Si je tenais un journal, j'aurais décrit la parenthèse et je me serais efforcée de n'en traiter que les détails infimes que j'aurais mêlés à ceux de l'espace.
Si je tenais un journal, j'aurais écrit que la façon dont vous me devinez quand vous m'écrivez me surprend presque et me touche infiniment.
Si je tenais un journal, j'aurais écrit combien il m'importe que vous partagiez avec moi vos peurs et qu'elles sont étrangement semblables aux miennes.
Si je tenais un journal, j'aurais écrit qu'hier, j'ai redescendu le boulevard, un sac de fruits dans une main, un sac de légumes dans l'autre, un sac à main sur l'épaule et un sac de pensées dans la tête qui m'étiraient au fur et à mesure de la descente un sourire grandissant.
Si je tenais un journal, peut-être aurais-je décrit une à une ces pensées, ces souvenirs imagés. J'aurais ajouté que, dans mes déambulations, je suis parfois obligée de marquer un temps et de fermer les yeux tant le trouble provoqué par ces images me traverse.
Si je tenais un journal, j'aurais parlé du mot "ambivalence" dont il a cherché devant moi la définition dans le dictionnaire. Je lui ai dis que j'aimais beaucoup les illustrations de son dictionnaire. Et que l'ambivalence nous est probablement nécessaire.
Si je tenais un journal, absorbée par l'écriture, je ne sais pas si j'aurais vu cette pie sur le toit d'en face, arrogante, joyeuse et insolente.
Elle m'inspire le goût de la désinvolture.
J'aurais sûrement le temps d'écrire après.
Et pendant ce temps où je ne tiens pas un journal, je travaille un peu pour vous (je vous montre bientôt) et pour des bébés tout neufs.
09/09/2015
*Arpenter*
Je travaille seule. Toujours.
Je ne parle pas.
Je ne sors pas de chez moi.
Je reste parfois en pyjama.
Mais parfois aussi je mets mes chaussures et je marche dans l'appartement et j'aime bien je travaille seule avec mes chaussures que personne ne voit mais je suis bien avec mes chaussures comme ça je vais de l'ordinateur à l'imprimante au café au balcon en haut en bas avec mes chaussures aux pieds.
Et quand ils rentrent ils me disent mais qu'est-ce que tu fais avec tes chaussures à talon ?
Ben rien.
Et puis on danse.
*
Tous ces gens qui écrivent tous ces gens qui écrivent tous ces gens qui écrivent tous ces gens qui écrivent tous ces gens qui écrivent tous ces gens qui écrivent tous ces gens qui écrivent tous ces gens qui écrivent tous ces gens qui tous ces gens
C'est vertigineux
Je me demande si eux aussi dans leur solitude ils arpentent leur balcon en talon...
05/09/2015
*Décoller*
Il avait dit : je voudrais un bouquet, c'est pour une fée.
Le fleuriste avait répondu : alors, si c'est pour une fée, il lui faut des fleurs variées.
A l'époque, mon lit se résumait à une plaque de mousse posée à même le sol dans une chambre sans fenêtre.
Ce jour-là, j'avais trouvé une brassée de fleurs multicolores qui sortaient leurs têtes de dessous ma couette.
Ce souvenir me traverse souvent.
Avoir été.
Vouloir rembobiner.
*
J'avance sur l'axe très droit entre deux rangées d'arbres tellement alignés que, la musique me portant, je me sens décoller.
Je pense à ces histoires qui se tissent dans le ciel au fil des mots mêlés.
Je pense à ces romans qui s'écrivent à notre insu.
Je ne voudrais pas m'arrêter de marcher.
29/08/2015
*Liseronner*
On aurait eu du mal à ouvrir la grille. Les liserons l'auraient envahie.
Je t'aurais suivi dans l'herbe haute, jusqu'à la porte de la maison.
Après avoir jeté un oeil à l'intérieur, tu m'aurais laissé entrer la première dans la pénombre. J'aurais avancé avec prudence dans le silence de la maison à l'abandon, j'aurais découvert les meubles endormis, l'immobilité de la poussière, une odeur particulière.
Je me serais tenue près de toi au moment où tu aurais ouvert les premiers volets. J'aurais voulu que notre regard découvre en même temps le jardin envahi. J'aurais été émue de voir entrer la lumière.
Tout comme je suis émue de l'écrire.
D'une pièce à l'autre, nous aurions répété ces gestes. La fenêtre. Puis les volets. Le regard. La lumière.
A chaque fenêtre ouverte, après, tu te serais tourné vers moi, en quête de mon impression.
J'aurais observé la couleur des murs, peut-être des tapisseries désuètes, peut-être des pierres nues. J'aurais tout observé. Les placards, que je ne me serais pas autorisée à ouvrir encore. Les chaises. Les fauteuils peut-être. La table. Les bibelots. Les photos. Les rideaux. Le carrelage. La baignoire. Les miroirs. Les absents.
En haut, je me serais assise sur le lit, au bout. Tu m'aurais rejointe. Nous n'aurions rien dit encore. J'aurais regardé le reflet de nos pieds dans la porte vitrée de l'armoire. Je crois que tu m'aurais embrassée.
Nous serions ensuite redescendus. On aurait pris des verres ou peut-être trouvé la cafetière. On serait alors sortis dans le jardin avec nos boissons à la main.
Un peu plus loin, on se serait allongés, enfoncés presque, dans le méli-mélo des herbes hautes et, ton bras sous ma nuque, on aurait attendu la lune.
Petite fiction pour un samedi soir de pleine lune, écrite depuis la grande ville, où les mauvaises herbes s'ennuient.
24/08/2015
*Repriser*
C'est un lundi de reprise, il pleut. Et le vent.
J'ai commencé par quelques courriers, répondu à des messages.
J'en retire cinq bribes :
Tout ce que je ne fais pas m'habite.
Mais on se souvient des petites vagues.
Parce que cela ne peut pas se dire tout simplement.
Je retiens que je suis une petite fille gâtée.
Je sens que l'appréhension commence à poindre.
J'ai retrouvé Augustin, et Christine Angot lui a dit :
"On vit, on est là, on partage des choses avec des gens, on leur parle, on fait des choses très intéressantes, on a plein d'émotions... On ne dit pas ce qu'on vit. Alors oui, on peut passer son temps à raconter sa journée son passé ses histoires, son histoire, comme on dit, mais ce qu'on vit, on ne le dit pas. Pourquoi ? Parce qu'on ne le sait pas bien."
Après ça, j'ai réfléchi longuement.
Voilà pourquoi je n'avance pas vite dans la reprise.
Je reprise à petits points à petits pas, l'accroc est assez vaste, l'entreprise minutieuse.
J'espère que vous avez passé un bel été ?
Je n'ai pas cessé de contempler l'horizon.
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