27/08/2014

*Sourisser*


Les cartes postales de l'été, suite et fin.

Carte postale n°7 :

"Le matin, je pose une mûre ou un morceau de pain à l'entrée d'un petit trou dans l'herbe. Dans la journée, le petit repas disparaît. C'est la maison de la famille souris. J'aime bien observer leur manège en prenant mon petit déjeuner dans le jardin.
Un matin, la petite fille de mes amis me rejoint. Comme je sais qu'elle change souvent de lit la nuit, je lui demande si elle a bien dormi. Elle me répond : oui mais "cette maison, elle nous plaît pas trop à nous la nuit." Je souris et je lui dis :
- A toi, tu veux dire ?
- Oui !"

Carte postale n°8 :

"J'ai autant besoin de solitude qu'elle me fait peur.
Je voudrais décrocher complètement de toutes ces attaches virtuelles mais je ne le fais pas complètement.
Je me sens prête parfois à tenter des expériences pour le plaisir de les écrire ensuite. Si je ne les vis pas entièrement, je les ébauche au moins pour me donner le droit d'imaginer la suite, et de l'écrire.
Pendant mes vacances, je ressens souvent l'envie de rentrer."

Carte postale n°9 :

"Alors que je me décide à écrire quelques cartes postales, je m'aperçois que je n'en trouve aucune que j'ai envie d'acheter et d'envoyer. Je me résigne. J'en choisis quelques-unes. Je les envoie.
Le lendemain, je tombe sur une boîte d'anciennes cartes postales que je trouve très jolies. J'en achète dix. Je ne les envoie pas. Je regrette de ne pas en avoir acheté plus. C'est la fin des vacances. Je rentre."

*

Et comme aujourd'hui, je viens de recevoir une très jolie carte de Rotterdam, je vais en envoyer une dixième dès demain...

24/08/2014

*Poursuivre*































Pour ceux qui suivent, je poursuis l'histoire du papillon noir qui m'attendait sur le rideau blanc.

Maïa a attrapé le papillon
Maïa a blessé le papillon
Maïa s'est amusé avec le papillon blessé
Maïa a mangé le papillon
Maïa a mangé le papillon noir qui m'attendait sur le rideau blanc.
Le papillon n'a pas crié. Le papillon s'est laissé faire. Presque.
Les papillons ne crient pas
Les papillons ne disent rien
Les papillons se laissent manger
Les papillons.

*
Pour ceux qui suivent, encore, la suite des cartes postales :

Carte postale n°4 :

"Je ne fais pas toutes les photos que je vois. Je fais très peu de photos. Je vois toujours beaucoup de photos que je voudrais faire. Je pense toujours à beaucoup de choses que je voudrais écrire.
Le 10 août, je reçois ce message : "Je pars pour une quinzaine, sans Internet ou si peu, je vous embrasse... pour quinze jours." Cela me fait plaisir. Puis je me dis que je ne suis sûrement pas la seule à l'avoir reçu."

Carte postale n°5 :

"J'aime traverser les villages et regarder les maisons aux volets fermés. J'aime le silence de leur abandon. J'aime les couleurs délavées des volets. Les écailles de la peinture. Les crépis vieillis. Leur solitude. Les possibilités de l'imagination. J'aime penser à la pénombre des pièces. Au grincement des volets si on les ouvrait."

Carte postale n°6 :

"Je passe en voiture par la rue principale de la petite ville. Je vois un jeune garçon assis sur une chaise orange sur le trottoir étroit, devant une fenêtre ouverte. Il a un petit enfant sur les genoux. Je trouve cette image très belle. Je regrette la photo que je ne peux pas faire. Le lendemain, quand je repasse, la chaise orange est toujours là, devant la fenêtre. Je m'arrête plus loin et je reviens faire la photo. (Un homme apparaît à la fenêtre et me regarde. Je pars vite.) Le surlendemain, quand je repasse, la chaise orange est toujours sur le trottoir. Les volets sont fermés. Je m'arrête et je reviens faire la photo. Le jour suivant, la chaise orange a disparu. La fenêtre est ouverte. Je ne fais pas de photo."

La chaise orange est là.

*

Et puis, bonjour Tristesse, je savais que tu ne me lâcherais pas longtemps.



20/08/2014

*Revenir*






















Quand je suis entrée dans l'appartement
Un papillon m'attendait
Posé sur le rideau blanc.
Un papillon noir.
Un papillon noir, sur le rideau blanc.

*

Pendant mes vacances, je n'ai envoyé que neuf cartes postales. Avec des minuscules pensées, ou des minuscules histoires.
Je vais les renvoyer d'ici, par trois.

Carte postale n°1 :

"Pendant mes vacances, j'ai commencé trois livres. J'aime beaucoup le titre du troisième. Je n'en ai terminé aucun encore.
Quand je lis, j'ai envie d'écrire. Alors je m'arrête. Mais j'écris peu finalement. Ou pas.
Je manque de solitude peut-être. Mauvaise excuse sûrement.
Je me déçois."

Carte postale n°2 :

"Je marche seule dans la garrigue. J'emprunte des petits chemins. Je gravis des petites montagnes. Je m'enfonce dans la nature inconnue.
Je pense à Pauline Lafont. Je me demande qui se souvient encore de Pauline Lafont."

Carte postale n°3 :

"Un matin, je roule seule sur la petite route déserte en écoutant chanter ce garçon à la voix plaintive. Je cherche du pain. Je roule 15 km avant le premier dépôt sans croiser personne. J'imagine que je roule vers quelqu'un.
En rentrant, je m'allonge sur le muret en pierre. Je ferme les yeux. Les enfants courent autour de moi. Par moments, j'ouvre les paupières et je les observe. Je regarde leur corps jeune, leur beauté. Je pense à leur avenir. Et au mien. Je pense : je ne suis plus jeune, moi."

A suivre...