30/04/2014

*Vivre*
























"- Comment on écrit une chanson ?
- Comme une lettre. Je crois que j'écris les chansons comme une lettre. Je n'ai pas le talent d'écrire sur commande. Pour que j'écrive, il faut que je vive."
Barbara.
(Echange entendu dans l'Atelier intérieur.)

*
Ça commençait à se serrer partout. Je suis sortie. J'ai refermé mon col avec ma main et j'ai longé la Seine jusqu'au jardin des Plantes. J'ai déambulé jusque dans le petit enclos rocailleux merveilleux envahi de succulentes de fougères de fleurettes de recoins de ruisseau, où je n'ai croisé que des promeneurs solitaires et contemplatifs.
En rentrant, un garçon en vélo est passé devant moi. Il tenait son guidon d'une main et, de l'autre, un parapluie bleu outremer ouvert au-dessus de sa tête. J'ai trouvé ça... je ne sais pas... chic ? Charmant. Elégant.

*
- Qu'est-ce que vous faites pour vous battre ?
- Je ne me bats pas.

*
Mais je n'ai pas écrit mon dernier mot. J'espère.

*
Vous viendrez danser ?

*
La carte qui chante. La carte qui dit Merci.

29/04/2014

*Ritualiser*











































Le lundi, j'ai quelques rituels. J'aime bien.
J'aime bien aussi enchaîner avec un imprévu. Une surprise. Un truc inattendu.

Des nouvelles graines par ici, envoyez, semez, fleurissez, c'est important pour les papillons !

26/04/2014

*Rester*



















Je me lève il est trop tôt mais je sens l'envie d'écrire qui me pousse.
J'écris la première phrase qui trotte depuis plusieurs heures déjà.
Et puis je l'efface.
Je ne veux pas que vous sentiez mon doute.
Je recommence.
Je change de direction je choisis celle-là j'aligne quelques mots.
J'efface.
Je ne veux pas que vous sentiez ma déception.
Je change de ton.
Et puis non.
Je ne veux pas que vous tentiez de lire entre les lignes.
Ha oui, je sais. C'est ça qu'il faut que je vous raconte.
J'efface. Je ne veux pas que vous sachiez ma joie.
Surtout ne plus faire de lien, garder tout pour soi, ne pas écrire tu sais j'aimerais bien. Non non non.
Plus rien.

Je regarde les pucerons vert tendre s'agglutiner sur mes boutons de rose. Je pense à tout ce que je voudrais écrire et que je n'écris pas.
Je pense aussi à la déconcertante sincérité avec laquelle je me confie parfois. Je pense encore au déconcertant mutisme dans lequel je m'emprisonne aussi.

J'ajoute une pensée pour quelqu'un que je ne connais pas et dont je viens de lire un très beau texte ce matin. Comme cette personne ne me lit pas, elle n'en saura rien, c'est bien.

Restons dans nos coins.

Tiens.
Oui.

Restons dans nos cases. Restons dans nos solitudes. Restons dans nos doutes. Restons dans nos villes. Restons dans nos silences. Restons dans nos douleurs. Restons dans nos sourires. Restons dans notre confort. Restons dans nos certitudes. Restons dans notre bonheur. Restons dans nos bras. Restons sur nos pieds. Restons incertains. Restons silencieux. Restons éloignés. Restons névrosés. Restons allongés. Restons devant nos écrans. Restons inertes. Restons dans le bain. Restons étrangers. Restons blessés. Restons évasifs. Restons en bordure. Restons compliqués. Restons calmes. Restons sur notre banc. Restons grands. Restons rien. Restons affamés. Restons sur notre chemin. Restons dans nos pensées. Restons sages. Restons émerveillés.
Restons muets. Restons sur les grands axes. Restons morts. Restons dans nos souvenirs. Restons en rade. Restons sur le tapis. Restons ignorants. Restons heureux. Restons de marbre.

Ne nous rencontrons pas.

Ce n'était pas du tout ça que je voulais écrire ce matin.
Je reviendrai demain.



24/04/2014

*Vérifier*















Cent fois, je l'ai copié.
(Ainsi, je vais vérifier si les punitions fonctionnent.)


22/04/2014

*Muguetter*





























Cette nuit j'ai dormi sur le canapé et j'ai rêvé que j'étais en retard et que je partais en courant au travail sans mes chaussures. Pieds nus dans l'ascenseur, essoufflée, à côté d'un jeune homme apprété, je m'appuyais contre la paroi et là : zut, mes clés ! Bon. Tant pis. Il y avait une chanson que j'adore (dans l'ascenseur) alors j'ai voulu mettre plus fort pour qu'elle m'emplisse et, en appuyant sur un petit bouton pour augmenter le son, je me suis aperçu que ce n'était pas la bonne chanson. En sortant dans les couloirs moquettés j'ai couru et j'ai bousculé une dame chargée. Tous ses sacs et documents sont tombés. Son regard m'a détestée et elle m'a renvoyé une désastreuse image de moi. Je me suis excusée et je lui ai proposé un petit chariot à roulettes pour transporter ses affaires. Elle était contente. Je suis entrée dans une salle de cinéma obscure et je me suis assise à côté de ce garçon que je ne connais pas en vrai mais dont il me semble percevoir le dédain et le dénigrement qu'il éprouve envers moi. Etrangement il m'a souri, a passé son bras autour de mes épaules et s'est mis à se confier à moi.
En me réveillant, je me suis dit, ne cherchons pas à interpréter, je vais plutôt dessiner du muguet.

Nouvelles cartes : Muguet et Violette.


19/04/2014

*Nuiter*


























Paris s'est vidée et moi je suis rentrée je crois même que je n'écris pour personne

Le silence me regarde attendre la nuit
J'attends la nuit car elle m'attend
Oui
Ce soir j'ai rendez-vous avec la nuit

En attendant j'écris à peine je danse à peine je songe à peine je mange à peine j'ombre à peine je lis à peine je chante à peine j'anticipe à peine je me prépare à peine j'oublie à peine
J'ai rendez-vous avec la nuit je sens l'élan qui me pousse c'est bien
Elle m'a dit, la nuit, je serai là devant le petit Casino venez je vous attends
J'ai dit d'accord, la nuit, attendez-moi je viens j'arrive j'accours je veux traverser Paris avec vous et ne rentrer qu'au petit matin
Quelle robe quelles chaussures quel parfum quelle histoire pour cette nuit-là ?
On s'en fiche

J'ai rendez-vous avec la nuit devant le petit Casino je suis bien je sens déjà sa main dans mon dos

Des petites choses que j'ai retrouvées.



12/04/2014

*Planter*




















Je le regarde. Il est planté devant la grande affiche du kiosque à journaux. Il porte un sac plastique dans une main, il ne bouge plus. Sur la publicité, une jeune femme, nue, en gros plan, cadrée juste au-dessous de la poitrine, cache ses seins avec ses mains. Une publicité pour un joaillier. La sobriété du luxe sur le papier glacé. La blancheur et la blondeur de cette femme parfaite. Et lui, devant, en arrêt, et moi qui le regarde et m'interroge. Mais qu'est-ce qu'il attend ? Qu'est-ce qu'il espère ? Que la jeune femme retire ses mains peut-être ? Il peut toujours rêver. Il faut toujours rêver un peu.
J'avance. Je ne vais pas rester plantée à regarder un homme planté devant une image plantée. Cela me rappelle le premier scénario que j'ai écris quand j'étais étudiante.
Plus loin, dans la cours d'un HLM, deux mamies ont déplié leur pliant au ras des pâquerettes. Il fait beau mais elles sont cachées sous la capuche de leur parka pour se protéger du soleil. Les caniches se chamaillent.
J'aime bien passer par là pour mes souvenirs.
Je pousse la grille et je m'étonne. Le petit banc ? Il n'y a plus de petit banc ? Il n'y a plus de petit banc. En réalité il n'y a peut-être jamais eu de petit banc. J'ai dû rêver. C'était bien. Il faut toujours rêver un peu.

Je vais aller marcher pieds nus dans l'herbe. J'aime bien marcher pieds nus dans l'herbe.

09/04/2014

*Kiter*















Rendez-vous 20h30/Place Colette/Du déjà-vu/Petits pas/Retard/Le pull gris/Grands sourires/Traversée du jardin du Palais royal déserté à la tombée de la nuit/Les chaises vides/Les fenêtres/Crissements/Celui qui se glisse dans son duvet sous le porche/Les grilles noires/La petite rue aux trottoirs étroits/Envie d'un pas de danse/Le même petit bar/Les mots bleus/La Pyramide/Les vendeurs de Tour Eiffel/Ma joue/Le beurre et l'argent du beurre/L'image des longues mains aperçues à 19 heures/La Seine/Quais frisquets/Les cases vertes des bouquinistes refermées/Tweeter : "Je n'ai pas compté combien de fois je suis rentrée par les quais."/L'endroit/Rien/Les hommes en orange lissent le bitume Quai d'Austerlitz/Bip/J'aime le gris/J'aime la nuit/Debout sur le muret pour la photo/Envoyer une exclusivité à Miss Suprbo en passant en bas de la Tour 13/

Ceci est un papillonnage en kit. Ingrédients classiques. A vous de l'imaginer.
(En attendant, j'essaie d'avancer.)

Un nouveau faire-part.

04/04/2014

*Repousser*























Depuis deux ou trois jours je pense à un nouveau projet. Depuis deux ou trois nuits je réfléchis je réfléchis et je me dis demain je m'y mets.
Ce matin je me décide. Je dois commencer aujourd'hui si je veux terminer à temps.
Oui aujourd'hui je m'y mets.
Mais avant je vais ouvrir toutes les fenêtres pendant un quart d'heure. Pendant que j'y suis, je secoue les couettes les couvertures je range les coussins les bols oubliés je vide l'évier.
Bon. Je m'y mets.
Une machine ? Oui. Ce serait bien.  Je trie le linge je choisis le plus gros tas je l'engouffre dans le tambour.
Je m'y mets.
Facebook ? Oui. Quand même. Un petit tour et une photo pour inciter à s'écrire des petits mots. Allez, pendant que j'y suis, un petit tour sur Instagram aussi.
Bon. Je m'y mets. Je sors un nouveau carnet. Ca aide les belles pages blanches.
Zut. La machine est finie. Bon. Je vide le tancarville et j'étends le linge qui sent bon.
Allez.
Un café ? N'importe quoi je ne bois jamais de café le matin mais là ça me dit bien.
J'ai mis trop de sucre mais c'est bon.
Je peux m'y mettre.
Je ne sais pas par où commencer c'est trop ambitieux c'est presque rien pourtant c'est n'importe quoi ça va être nul je ne vais pas y arriver autant ne pas commencer il faudrait quelqu'un pour me secouer me pousser m'aider me
Un mail.
Mon imprimeur. Il me dit votre BAT est prêt.
Parfait.
Je file m'habiller. Voilà une bonne occasion de ne pas travailler.
Bon. A ce rythme-là, je crois que mon affaire est plus que compromise.

02/04/2014

*Râper*





















Dans le dernier livre que j'ai lu, il est question d'amour de beauté d'internement de corps. Pendant ma lecture et à la fin, je réfléchis beaucoup.

Hier j'ai reçu un message où il est question d'un souvenir et de tremblement. Le souvenir devrait arriver dans une enveloppe bientôt. Je suis déjà touchée.

Dans mon carnet j'ai écrit : les gens meurtris écrivent de beaux livres, elles sont si petites mes égratignures.
Dans mon carnet j'ai écrit bien d'autres choses. Je sens le même sujet qui rôde.

Dans l'avant-dernier livre que j'ai lu, il est question dans un passage d'une moulinette à râper le gruyère. Cela m'a rappelé que nous en avions une quand j'étais petite.
J'ai envie de retrouver une moulinette à râper le gruyère. J'ai envie de tourner la manivelle et de regarder le gruyère tomber dans ma soupe ou sur mes coquillettes.
En attendant je dessine des petites chaussures et je ne sais pas pourquoi.