16/09/2015

*S'ajournaliser*





















Si je tenais un journal, j'aurais écrit qu'il avait cessé de pleuvoir et que j'aime pédaler quand l'asphalte luit dans le soir, quand le caoutchouc des pneus s'imprime sur le gris avec une petite musique presque poétique et quand s'élèvent au-dessus du jardin sombre des parfums de feuilles mouillées.
Si je tenais un journal, j'aurais écrit que j'ai aimé attendre dans la rue derrière la porte vitrée et que je sentais se former très profondément en moi le sourire à venir.
Si je tenais un journal, j'aurais décrit la parenthèse et je me serais efforcée de n'en traiter que les détails infimes que j'aurais mêlés à ceux de l'espace.
Si je tenais un journal, j'aurais écrit que la façon dont vous me devinez quand vous m'écrivez me surprend presque et me touche infiniment.
Si je tenais un journal, j'aurais écrit combien il m'importe que vous partagiez avec moi vos peurs et qu'elles sont étrangement semblables aux miennes.
Si je tenais un journal, j'aurais écrit qu'hier, j'ai redescendu le boulevard, un sac de fruits dans une main, un sac de légumes dans l'autre, un sac à main sur l'épaule et un sac de pensées dans la tête qui m'étiraient au fur et à mesure de la descente un sourire grandissant.
Si je tenais un journal, peut-être aurais-je décrit une à une ces pensées, ces souvenirs imagés. J'aurais ajouté que, dans mes déambulations, je suis parfois obligée de marquer un temps et de fermer les yeux tant le trouble provoqué par ces images me traverse.
Si je tenais un journal, j'aurais parlé du mot "ambivalence" dont il a cherché devant moi la définition dans le dictionnaire. Je lui ai dis que j'aimais beaucoup les illustrations de son dictionnaire. Et que l'ambivalence nous est probablement nécessaire.
Si je tenais un journal, absorbée par l'écriture, je ne sais pas si j'aurais vu cette pie sur le toit d'en face, arrogante, joyeuse et insolente.
Elle m'inspire le goût de la désinvolture.
J'aurais sûrement le temps d'écrire après.

Et pendant ce temps où je ne tiens pas un journal, je travaille un peu pour vous (je vous montre bientôt) et pour des bébés tout neufs


6 commentaires:

mirabellef a dit…

J'aimerais bien.. :-)

sylvie kapal a dit…

j'aime la grâce de la libellule et la profondeur de vos mots

arrosoir a dit…

le sac de pensées qui avec les autres t'étire m'enchante, m'inspire des images...

(J'ai beaucoup de retard en emails mais pas en pensée...je te suis. bise)

Nikole a dit…

J'ai adoré les mots du 22 sept sur le "deuxième papillon" mais comme on ne peut laisser de com là-bas, je le dis ici :-)

Nikole a dit…

Et sinon
"Je me demande si vous me suivez"
Pas dans les détails, certes, mais dans l'esprit et le "principal", je crois bien que oui.
De toute façon, j'aime les écritures elliptiques, quand elles laissent un bord de trottoir où poser le pied.

cecile a dit…

Oh quel beau et bon moment de lecture ,je viens de vivre. Je le mets dans mon sac à bon moment . merci cecile