01/06/2015

*Cocher*



J'ai dit secouez-moi et elle m'a demandé de dessiner des framboises.
Après j'ai choisi l'évasion.
Ce n'est pas vraiment par hasard que j'ai poussé la porte du numéro 20. J'ai cédé à la facilité pour regagner en légèreté, je n'ai donc pas résisté aux chaussures. Elles sont parfaites elles sont starlettes elles sont invite-moi à prendre un verre elles sont invite-moi à rire avec toi.
L'eau du canal était vert printemps je l'ai enjambé en passant sous la fraîcheur du marronnier. Les fleurs étaient sur leur fin, j'ai pensé aux mains.
Sur la placette aux brocantes j'ai pris une citronnade à la paille en déambulant entre les vieux tableaux les verres anciens les pampilles les lampes sur pieds les meubles bancals et le chien au repos.
J'ai enfourché un vélo.
(Le garçon, dans le magasin, il a dit, avec ces chaussures-là, il ne faut pas faire de vélo, il ne faut pas conduire, il ne faut pas marcher dans les graviers ni sur les bouches d'égout ni. Qu'à cela ne tienne, je les tiendrai à la main et je courrai en ballerines. Je m'arrêterai sous un porche pour les enfiler et j'enverrai les autres au panier.)
J'ai pédalé, l'air frais se glissait dans mes manches des larmes s'enfuyaient sur mes tempes.

*

A la maison Karrenbauer, rue de Charonne, il est écrit "A toute heure, on vous sert le bonheur."
Il était 11 heures j'ai pris une brioche au sucre et un café allongé j'ai voulu tester. Les tables rondes étaient alignées sur le trottoir je me suis assise à la cinquième en partant de la gauche. Déjà c'était agréable. A 11h30 j'ai pris la barre et au premier plié je souriais. J'ai senti que ça commençait à décliner au moment des grands battements. Je me suis dit que je prendrai un autre café en sortant.

*

Un jour elle m'a dit, il y a beaucoup de chaussures dans ton écriture.
Un jour il m'a dit, il y a beaucoup de "pas" dans votre écriture.
Aujourd'hui je me dis que finalement tout ça est assez cohérent.

*
- Tu sors de la pénombre quand même ? me demande-t-il.
- Je suis en pleine clarté, je lui réponds.

*

J'ai coché les cases j'ai choisi les dates l'année prochaine j'irai au spectacle.
"Cocher, ça veut dire faire une croix dans un petit carré", explique la petite fille dans le TGV.


3 commentaires:

mirabellef a dit…

C'est beau, comme toujours petit papillon. J'aime beaucoup l'idée de courir en ballerine tes nouvelles chaussures à la main.

Nikole a dit…

Le papillon bat des ailes et des mots se dessinent. Chaque fois -ou presque- ça fait battre mon coeur. Je ne comprends pas ce qui se passe dans ces mots-là pour que batte mon coeur avec tant de ferveur. Je ne comprends pas. Papillon est un mystère, alchimiste qui ne sait pas toujours qu'il y a de l'or au bout de ses plumes. Il ne faut pas en dire plus parce que ça paraît si étrange, cette admiration. Mais je n'y peux rien, j'ai une admiration pour ces mots, ce monde intérieur, cette sensibilité à fleur de peau, de rêve et de beauté. C'est comme ça.

lisaetcetera a dit…

Que j'aime ces textes qui me surprennent et m'emportent...